Extrait :
Prologue
Vous commencez.
Ici, c'est bien. A son bureau. Sur sa chaise. Sa machine à écrire est la seule chose qu'il reste de lui dans la pièce. Le ruban d'encre est neuf, les lettres de métal s'impriment bien en profondeur, comme s'il l'avait placé là pour vous, en vue de ce moment précis. Vous tapez doucement, au début. Des bruits lourds pour vous habituer au poids de l'écriture à l'ancienne. Vous vous affairez tant bien que mal sur cette belle machine antique car, si vous commettez une erreur, vous ne pouvez pas effacer et vous voulez que ces pages soient claires, propres. Vous travaillez avec son vieux livre de l'époque victorienne à vos côtés, le recueil de pensées qu'il vous a donné un jour, A Woman's Thoughts About Women, et qui contient dans ses pages tout ce qui s'est passé ici, ce souffle de vie d'autrefois. Vous revivez les dialogues à travers vos deux écritures, ces notes laissées en marge et à la fin du livre. Vous ne savez pas très bien ce que vous allez faire avec tout ça. À ce stade, vous n'en êtes encore qu'à rassembler, récupérer toutes les idées de ce carnet aux feuilles marquées par le temps, la saleté et la vie, une vie lumineuse : des gouttes de sueur, d'encre et de pluie ; des traces de sève, de terre et de cendre ; de la graisse de vélo, la traînée luisante d'un escargot, l'aile d'une cigale aux nervures carrées et fragiles. Vous récoltez ses mots, les vôtres, puis ceux de la femme au foyer victorienne, ses leçons de vie, sa voix de guide. Elle va vous montrer le chemin. Dites la vérité et n'en ayez pas peur, vous rassure-t-elle. Oui.
Écrire, pour comprendre.
Comme vous travaillez, vous sentez une présence, une main posée au creux de vos reins qui vous pousse à continuer. La main de tous ceux qui ont déjà aimé, déjà perdu et déjà fait partie de ce club fermé : celui des coeurs en vrac. Votre petit recueil n'est jamais loin, ce livre que vous êtes venue enterrer ici, dans les tréfonds de cette vallée qui accueillera aussi un jour votre propre chair, avec amour, les bras ouverts, vous le savez. Parce que c'est ainsi. Parce que c'est bien comme ça. Parce que là est votre place.
D'abord, ce livre doit servir un autre but.
Vous vous sentez forte, illuminée.
Entière.
Écrire, pour trouver toutes les réponses.
Vous n'avez jamais raconté ça à qui que ce soit. Personne ne sait ce que vous pensez vraiment. Il vous avait toujours paru très important de ne jamais rien leur dire ; de ne jamais leur montrer la laideur, la violence, la splendeur, l'égoïsme, la gloire ; de ne jamais leur laisser de porte ouverte. Il vous avait toujours paru important de préserver votre équilibre, votre sourire, votre carapace, en toutes circonstances. Vous ne supportiez pas l'idée que quelqu'un sache qui vous êtes vraiment.
Mais maintenant, le temps est enfin venu. De cette prise de conscience est née la libération. Il vous a fallu des années pour en arriver là.
Présentation de l'éditeur :
«Le désir peut-il être si sclérosé qu'il disparaît pour de bon ? Enfoui trop profondément pour être un jour de nouveau attisé ? Vous pensiez ne plus jamais vouloir coucher avec quelqu'un, que ce genre de vie était derrière vous. Vous aviez eu vos enfants. Le sexe avait rempli son rôle. Vous aviez l'impression d'être cassée, qu'il était trop difficile de vous réparer. Les adultes ne se réparent pas. Leur état empire. La vie les consume peu à peu et ils en portent les cicatrices jusqu'à la fin de leurs jours. En fait, elles durcissent, se calcifient.
Mais vous vous sentez libérée. Par miracle.»
Nikki Gemmell vit en Australie. Son best-seller La Mariée mise à nu a été traduit dans quinze langues.
«Gemmell parle du sexe de manière incroyablement lucide, brutale presque, comme rarement les femmes le font, sensuelle aussi.»
Natalie Levisalles, Libération
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